La piscine et le supplice des douches

La piscine municipale, dans mon enfance, était composée de deux bassins. Un petit bassin qui allait de 0 m de profondeur à 1m et le grand bassin qui allait de 1.50 m à 3 m. Avant d’apprendre à nager, c’est-à-dire lorsque je me barbotais dans le petit bassin, on avait la hantise de tomber par inadvertance dans le grand bassin. Et on devait à coup sur se laisser noyer que d’être sauvé par le fameux Maitre Nageur Taureau. En effet on préférait peut être noyé que d’être sauvé par Taureau et subir par la suite les coups inhumains de son morceau de tuyau en caoutchouc ou plastique qu’il tenait constamment dans sa main. Du moins pour moi que je ne supportais jamais d’être frappé. Ce bonhomme noirci presque brulé à force de passer son temps l’été sous le soleil. Il était de grande carrure sévère et intraitable, je l’ai connu par la suite après avoir grandi en d’autres circonstances et la peur que j’avais de lui étant enfant se transforma dans une certaine mesure un autre sentiment qui n’était pas bon du tout.. Taureau qui par définition devait avoir un corps de sportif maintenu par la natation ne donnait guère cette impression car il avait la bedaine qui sortait un peu trop de l’ordinaire. Peut être à mon époque il prenait déjà de l’âge. Ce qui le caractérisait est surtout ce contraste de sa carrure et son comportement, avec sa voix qui était particulièrement aigu. Enfants, nous nous en donnions à cœur joie d’en rire de cette vois surtout par vengeance de ces coups inhumains de tuyau qui nous rouait avec sur tout le corps pour nous faire sortir avant 15 H de pour laisser soit disant les grands rentrer. En réalité c’était surtout pour le bar qui allait recevoir ses clients habituels. Le bar était tenu par Medeghri le frère du Ministre.
Mais malgré le zèle de Taureau, cela ne nous empêchait pas de profiter au maximum de la piscine et tirer profit de nos 50 cts, le prix du ticket qu’on achetait à la rentrée au guichet qui était tenu par Kadi. On rentrait à 9 h sonnées jusqu’à 3 h de l’après midi avec comme déjeuner un simple casse croute généralement qui était pour moi un morceau de pain et une tomate… C’est pour cette raison la piscine évoque pour moi ce délice du fameux déjeuner tardif qu’on prenait pratiquement au temps de la Achouia, une fois sorti de la piscine. Le délice était surtout dû à la faim de loup qu’on avait en sortant de cette longue journée de nage qui nous pouvait nous faire manger des pierres et les apprécier comme du caviar.
Taureau nous apprenait pas à nager, il était là pour surveiller le respect des horaires des rentrée des enfants et personne ne s’aventurait à aller au grand bassin s’il ne savait pas nager car le premier pas risqué de ce coté, il verrait son dos fouetté par le tuyau.
Quant à moi j’ai appris à nager que suite à un accident, qui m’a vu être poussé par un camarade à moi, malintentionné dans le grand bassin, je n’ai du mon salut qu’à ces débats de survie pour commencer mes premières leçons de nage…et ce n’est qu’en me débattant dans cette tentative de survie que j’ai appris à nager. Et c’était presque le cas de tous les enfants.
Mais comme toujours il y a un mais, ce sont les douches de la piscine qui m’intriguait le plus et ce n’est que l’longtemps après en grandissant que j’ai compris pourquoi les douches de la piscines avaient cette bizarrerie qui nous gênaient au point où certain enfants essayaient de les éviter à tout prix au risque de rencontrer le fameux tuyau. En effet une fois déshabillé dans les vestiaires et posés nos habits dans ces jolis cintres spéciaux, des cintres métalliques dont le bas est confectionné un genre de corbeille qui entait destinés à garder nos chaussures.

Alors pour regagner les bassin on devait passer par un seul accès, composé d’un couloir de 3 m de long et de 1.5o m de largeur. Ce couloir qui est en même temps une salle de douche collective, voyait l’eau sortait de toutes part à travers de nombreux pommes de douches accrochées au plafond et aux murs . Mais le hic dans ce couloir et le bizarroïde est que le parterre n’était pas plat. Tiré de bout en bout du couloir un muret en béton sous forme pyramidale tronquée du haut afin de former un semblant de main courante sur laquelle on tenait afin de ne pas tomber. Ainsi coincé par ce muret et le mur du couloir, formant ainsi un sillon on devait tenir des deux mains au mur et sur la main courante de toutes nos forces afin de plaquer nos les plats de nos pieds sur le mur d’un coté et le muret qui est en pente de l’autre coté. Et pour augmenter la difficulté de ce mouvoir tout a été revêtu d’un enduit et une peinture lisses qui nous faisaient glisser et tomber dès qu’on arrive à poser les pieds sur le mur ou le muret.. Ainsi pour sortir de ce couloir on devait tomber plusieurs fois avant d’atteindre le bout. C’était vraiment une gageure de passer ce couloir. Un vrai parcours de combattant. C’était le supplice des douches.
Et à chaque fois je me disais pourquoi ce supplice sadique qu’on nous faisait subir avant d’aller nous baigner et je le classais dans la catégorie du tuyau de Taureau. Ce n’est qu’en grandissant que j’ai deviné le pourquoi de la chose tout en saluant avec gratitude l’ingéniosité du procédé. En effet cette contrainte était destinée à contraindre les récalcitrants à prendre une douche avant d’entrer dans l’eau du bassin pour une simple exigence d’hygiène. Et dire malgré cette astuce ils y avaient certains qui réussissaient à contourner le passage des douches en ressortant de la porte d’entrée des vestiaires et chevaucher la clôture pour regagner les bassins. 
Avant que j’apprenne à nager, l’idée était répandue que le bassin le plus dangereux n’était pas celui de 3 m de la piscine municipale, mais c’était celui de 5 m de la piscine de la légion (laligeou) qui était dans la périphérie de la ville, la périphérie de l’époque bien entendue. 
Cette piscine qu’on arrivait à la visiter quelques fois, était un peu abandonnée et le système des filtres du renouvellement d’eau, y était inexistant à cette époque et puis il n’y avait pas Taureau pour la surveiller, malgré tout ce que j’ai dit de lui. Donc elle comportait un danger d’un autre registre. Et cette piscine avait aussi son bar, mais ce bar avait une mauvaise réputation tenu par un personnage qui s’appelait …… il vaut mieux ne pas citer de nom.

 

 

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